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Le Docker : la technologie au service de la traction animale.

D 28 mars 2013     H 10:59     A Traitgenevois     C 0 messages


Nous avons déjà parlé ici des véhicules à assistance électrique développés par la société Meterus.
Rappelons la philosophie de la machine. Dérivée du vélo électrique, elle propose une assistance électrique ponctuelle pour aider le cheval dans les moments difficiles où un surcroit de puissance est nécessaire.
L’idée de l’aide de courte durée n’est pas nouvelle.
Paris-Chevaux de renfort.
 
Au 19ème siècle et au début du 20ème, des chevaux de renfort étaient placés au bas des fortes déclivités pour aider les équipages à les franchir.
Ces chevaux étaient exploités par les "Côtiers" qui louaient leurs services le temps de gravir la pente.
C’était une activité très réglementée.
Elle pouvait aussi bien s’adresser aux particuliers qu’aux lignes d’Omnibus de l’époque, s’exercer à la ville ou à la campagne.
 
D’autres solutions d’aide aux chevaux, mécanisées celles là, ont été employées par le passé.
Près de Hambourg, en Allemagne, à partir de 1912, ce trolley aidait à la montée d’une pente à environ 5% sur une distance de 600m. (Tout l’article sur le blog d’Hippotèse et de Low-tech Magazine).
 
 
Le Docker se distingue cependant de ses prédécesseurs par le fait que l’aide est embarquée.
Ici pas de cheval ni de véhicule qui attend en bas de la côte ce qui confère à l’ensemble une bien plus grande autonomie de circulation.
 
Le cœur du système se compose de deux éléments originaux.
 
Le palonnier equiForce dont nous avons déjà parlé. C’est lui qui va transmettre à l’électronique les données concernant l’effort consenti par le cheval.
 
Un essieu motorisé de 4kW- 48 VDC. qui va fournir à point nommé la puissance supplémentaire nécessaire.
 
Une batterie au lithium de 48V- 50Ah, une électronique embarquée chargée de piloter le système et divers instruments de conduite complètent le système d’assistance.
 
La machine en elle même est construite par Bernard Michon Hippomobile. Dotée d’une boule à l’arrière, elle s’adapte à la traction des matériels existants.
 
Il ne s’agit en aucun cas de substituer le moteur au cheval mais bien de l’aider dans les moments difficiles du parcours où un augmentation de la puissance disponible est la bienvenue.
Ce système permet de soulager le cheval dans sa tâche soit parce que, par exemple, le profil de la route est fortement ascendant, soit parce que sa charge est momentanément augmentée.
Là où deux chevaux seraient ponctuellement nécessaires, un seul suffira.
Dans le cas d’une utilisation en cheval communal, l’équidé pourra franchir des pentes avec moins d’effort et/ou tracter une charge augmentant au fil de la tournée.
 
Il en résulte une économie de chevaux (un au lieu de deux), mais aussi une économie de fatigue pour le cheval (et donc un meilleur respect de l’animal), un allongement de sa durée de service et un confort d’utilisation pour le meneur.
 
Il ne faudrait cependant pas penser que cette machine résout tous les problèmes de menage.
Il est indispensable que le meneur soit bien formé et que les chevaux répondent aux exigences d’une circulation en milieu urbain.
Le menage en paire ou en simple pose certains problèmes spécifiques qu’il ne faut pas sous-estimer.
La connaissance de ses équidés, de leurs capacités et de leurs limites reste une condition de la réussite.
 
L’été dernier, deux présentations ont été conduites avec le Docker. Une à Avenches, en Suisse, et une en ville de Mâcon.
 
Photo Deny Fady-Hippotèse.
 
A Avenches, le Docker tractait un porte-conteneurs surbaissé construit lui aussi par Bernard Michon Hippomobile.
 
Photo Deny Fady-Hippotèse.
 
Les rues en pente vont être abordées avec plus de facilité, même en charge. C’est le meneur qui va déterminer, en fonction de son cheval, à partir de quel effort au collier le moteur du Docker va commencer à aider à la traction du véhicule.
A l’inverse, les descentes seront mises à profit pour recharger la batterie.
 
Photo Deny Fady-Hippotèse.
 
Selon la valeur d’effort à l’épaule consignée par le meneur, l’électronique mise au point par les ingénieurs de Meterus va progressivement mettre le moteur en action afin de ne pas perturber la traction du cheval. Celui-ci aura alors l’impression de toujours tirer la même charge, que celle-ci s’accroisse du fait de la collecte ou parce que la pente augmente.
Alors ce Franche-Montagne pourra s’imaginer être un puissant cheval Percheron !
Le Docker s’adaptera donc au cheval qui y est attelé.
Cheval puissant demandant peu d’aide ou cheval plus léger ou peu entrainé en début de saison, le meneur pourra moduler l’aide à apporter à son équidé.
 
Photo Deny Fady-Hippotèse.
 
La machine a également pu démontrer ses qualités de manœuvrabilité, une aptitude importante en ville.
 
Lien vers la vidéo de la présentation ICI

 
Déjà pionnière en matière de cheval communal, la ville de Mâcon a accueilli le Docker, début octobre, pour une démonstration.
Voir avec ce lien une partie de la démonstration en ville de Mâcon ICI
 
 Ces deux succès confortent les constructeurs de la machine dans la justesse de leurs choix.
Le Docker, encore ici au stade de prototype, va subir quelques améliorations avec notamment un changement de moteur. 
Passant de 4kW à 5 kW celui-ci permettra une meilleure prise en compte de la puissance demandée au démarrage en côte.
 
Alors, le Docker s’insère t-il dans une démarche de développement durable ?
Le volet coûts fait débat. La tournée revient-elle plus cher ou moins cher qu’avec des moyens thermiques ? Faute d’une base de calcul cohérente et acceptée du plus grand nombre, la question est difficile à trancher.
Tout dépend précisément de ce que chacun inclura dans le bilan financier. Il est tout de même vraisemblable que ce coût puisse être supérieur aux moyens traditionnels.
 
Le point de vue écologique semble, à première vue, plus facile à appréhender. La circulation d’un véhicule comme le Docker peut raisonnablement être vue comme moins polluante en CO2 que des machines à moteur thermique. Sa pollution sonore est elle aussi moindre que les camions de ramassage. Ses rejets, bien canalisés sont peu importants (mais pas inexistants) et n’ont que peu d’incidence sur l’environnement immédiat.
 
La partie sociale est, elle aussi, difficile à mesurer.
Les retours des personnes de la voirie ayant utilisé la machine à Avenches sont excellents.
A Mâcon, par exemple, ce sont des personnes du CAT (atelier protégé) qui travaillent autour de l’attelage. Il n’est pas négligeable de pouvoir insérer des personnes en difficulté dans le tissu social.
 Bien sûr, le retour des chevaux en ville se fait pour le plus grand bonheur des enfants (et souvent des parents). On se prend plus facilement d’affection pour des chevaux que pour des machines.L’acceptation de ce mode de ramassage par les automobilistes n’est, quant à elle, pas facile à estimer.
 Le Docker prend mieux en compte le confort de l’animal qui tracte, lui évitant les travaux harassants du siècle dernier. De ce fait il à moins de chance de se heurter à la réprobation des citoyens des villes.
 
 
Le futur se présente bien puisque la commune d’Avenches semble décidée à démarrer son projet de cheval municipal à l’aide du Docker en 2014. D’autres chantiers test sont prévu en 2013. Nous essayerons d’en rendre compte.
Une affaire à suivre...
 
Fiche technique du Docker :
PDF - 526.4 ko
 
Pour tout renseignement complémentaire contacter Marco zandonà.
 
La photo des chevaux de renfort nous a obligeamment été fournie par l’excellent blog attelage-patrimoine et est tiré de l’article " La vie d’un cheval à Paris en 1890".
 
 
Merci au blog Low-tech Magazine pour nous avoir autorisé à publier la photo du trolley.