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L’organisation : circuler, mettre au repos, nourrir, ferrer. Les chevaux des mines (6).

D 11 janvier 2013     H 11:28     A Traitgenevois     C 0 messages


Comme toute industrie l’exploitation houillère repose sur une organisation du travail la plus rationnelle possible.
Nous ne considèrerons que ce qui concerne l’utilisation des chevaux.
Les ingénieurs des mines se sont attachés à prouver la rentabilité des chevaux à un moment donné mais cette rentabilité repose sur une bonne organisation du travail au fond de la mine.
 
Aubin-Le Gua. Aveyron.© Collection Yves Paquette.
L’accès aux galeries peut se faire soit par des plans inclinés soit par les puits.
Dans l’un et l’autre cas les sections devront être adaptées aux équidés utilisés.
Les galeries devront permettre leur circulation dans les meilleures conditions.
 


Les ânes seront employés dans les mines comme ici,probablement dans la région d’Ancenis (Loire-Atlantique). Sa robustesse et sa résistance en firent souvent une alternative aux chevaux surtout dans les exploitations du sud du pays Collection Yves Paquette.
 
Les premières galeries équipées de chemin de fer ne recevront que des voies uniques et seront de ce fait de section réduite. Des niches seront creusées de loin en loin pour permettre à des mineurs de s’y réfugier lors du passage des convois.
 
La solution la plus rationnelle pour le transport consiste à faire se déplacer en sens inverse, un convoi plein de charbon de la taille au puits d’extraction et un convoi vide du puits d’extraction à la taille.
Les convois devant nécessairement se croiser,la galerie sera élargie et à double voie à cet endroit. Les convois circuleront à une vitesse régulière d’environ 1m/seconde. La distance entre chaque croisement est variable selon les puits, mais l’idéal est que le convoi montant et le convoi descendant arrivent en même temps à ce croisement afin de réduire les temps d’attente.
La distance entre ces ces évitements (ou tiernes) va reposer sur un compromis entre une distance suffisamment courte pour éviter les à-coups dans la circulation et suffisamment longue pour diminuer le nombre de redémarrages nocifs au cheval (1)
Le tout reposera sur une organisation extrêmement minutieuse. et sur des aménagements qui varieront d’une compagnie à l’autre, chacune d’elle recherchant les solutions les mieux adaptées à ses intérêts.
 
 
Les écuries sont divisées entre celles de surface et celles du fond. Nous ne nous attarderons pas sur les premières quoiqu’elles aient leur importance pour loger la cavalerie qui travaille sur le carreau de la mine.
 
 
Louis Simonin La vie souterraine ou les mines et les mineurs", Librairie de L. Hachette et Cie, 1867 .© Collection Yves Paquette.
Dans la mine, les chevaux devront trouver de quoi se reposer. Les écuries du fond, plus ou moins spacieuses selon les mines et les époques, rempliront ce rôle.
 
Anagoria- Le cheval de mine Tobias- Musée allemand de la mine à Bochum.
Elles iront d’une simple excavation dans le rocher à de véritables écuries maçonnées. (Photo 1).
Elles seront en général placées le plus près des puits d’entrée d’air afin de fournir un air le meilleur possible aux équidés.
Dès que l’exploitation sera d’importance, des travaux conséquents pourront être entrepris. Les parois seront cimentées, parfois drainées afin d’éviter, autant que faire se peut, l’excès d’humidité néfaste à la santé des chevaux.
Ces écuries seront équipées de râteliers et de coffres pour remiser l’avoine. Ces matériels seront dans la mesure du possible métalliques toujours dans le but de lutter contre les effets de l’humidité.
La litière, en paille de blé ou d’avoine, est régulièrement changée. Les compagnies revendent le fumier. Dans la région d’Alès, la tonne se négociait 10 francs à la fin du 19ème siècle (2).
© Collection Yves Paquette.
Vers 1925, les emplacements sont d’une grandeur recommandée de 2m par 3m et peuvent être équipés de bas flancs. Ces dimensions étaient sans doute moindres au début du 19ème siècle au vu des moyens de percement.
 
Règlement de la compagnie d’Anzin. © Collection Yves Paquette.
 
 Chaque compagnie va avoir ses propres règlements concernant l’alimentation des équidés.
 Celui ci-dessus est édict&eacutee par la compagnie des mines d’Anzin, dans le département du Nord, pour l’année 1900.
 
© Collection Yves Paquette.
Le docteur vétérinaire André Deleau , dans son ouvrage "Du cheval de mine" paru en 1926, recommande les rations ci-dessus et les distributions selon la photo 2.
 
Musée de La Machine.
Cette note était en vigueur en 1949/1950 à La Machine dans la Nièvre.
 
Le foin sera descendu quasiment de manière journalière depuis la surface afin d’éviter son pourrissement dans l’atmosphère extrêmement humide qui règne au fond. (Photo 3).
L’eau quant à elle était amenée dans des citernes ou des wagonnets fermés réservés à cet usage.
Le palefrenier aura la responsabilité de son écurie. C’est lui qui s’occupera du pansage des animaux, à défaut celui-ci incombera au charretier. Le palefrenier assurera également la garde de la cavalerie souterraine. Un roulement du personnel sera organisé nuits et jours, dimanches compris (photo 6).
 
Fers des mines. Musée de La Machine (Nièvre).
Le ferrage des chevaux du fond sera fait à froid.
Le maréchal-ferrant aura à sa disposition, en surface, les modèles des fers de chaque cheval afin de les forger à l’extérieur des puits.
Aux mines de La Machine une note précise la rémunération du maréchal, Monsieur Dubois, à partir du 1er mars 1897. Elle se décline comme suit :
Chevaux de l’extérieur : 4 francs par cheval.
Puits des Glénons : 7 francs par cheval.
Puits des Zagots : 5,5 francs par cheval.
On peut supposer que ce maréchal-ferrant faisait partie de ceux embauchés occasionnellement en ville en plus de ceux qui étaient employés à temps plein par la compagnie. (3).
La fréquence des changements de fers va de 15 jours 3 semaines, rarement à 1 mois.
C’est quasiment toujours l’usure des fers et non pas la pousse de la corne qui impose ce changement.
En 1926, André Deleau précise cette fréquence : de 20 à 25 jours pour les chevaux travaillant dans des galeries sèches et 15 jours parfois même 10 jours pour ceux qui travaillent dans des galeries humides (4).
En général chaque puits possède son travail à ferrer (photo 4) mais le ferrage peut également se faire sans (photo 5) . Les fers utilisés dans les mines ne présentent pas de garniture et leurs éponges sont raccourcies pour éviter le déferrage sur les voies de chemin de fer.
Quelquefois le maréchal devait intervenir pour remplacer un fer perdu. Un tel incident avait une répercussion sur la production et devait donc être réparé au plus vite.
Mais il arrivait, vue l’obscurité qui régnait au fond, que le charretier ne s’aperçoive pas de cette perte avant le changement de poste. Dans ce cas l’usure de la corne pouvait nécessiter une mis au repos de l’équidé.
Le rôle du maréchal ne se bornait généralement pas au ferrage. Il intervenait également pour prodiguer les premiers soins en cas de blessure qu’elle soit bénigne ou qu’elle nécessite l’intervention du vétérinaire.
Un bon maréchal était précieux pour dépister les débuts de maladie.
Tous les matins il procédait, aidé du palefrenier, à l’examen des pieds des chevaux.
 
A suivre.
 
 
(1)D’après le livre "Les chevaux de mine retrouvés" de Sylvain Post (avec la participation du docteur Pascale Kientz-Lahner et de Jacques Urek), disponible en libraire, sur commande aux Ed. De Borée Diffusion.
(2) Mémoires et compte-rendus de la société scientifique et littéraire d’Alais.
Alais 1895.E. Boissier.
(4) Du cheval de mine. André Deleau de la faculté de médecine de Paris. Lyon. Imprimerie Bosc frères et Riod. 1926.
 
Reproduction des photos et textes strictement interdite sans autorisation.
 

Les cartes postales du portfolio sont issues de la collection de Mr Yves Paquette.

Portfolio

  • 01 . Ecuries au fond. A droite nous pouvons voir la paroi rocheuse dans (...)
  • 02 . Distribution des aliments selon le docteur vétérinaire A. Deleau. 1926. (...)
  • 03 . Fosse n°2 Ste Henriette. Creusée en 1855 à Henin-Beaumont. Le puits (...)
  • 04 . Ferrage au fond de la mine à Roche-la-Molière (Loire) . Au mur du fond, (...)
  • 05 . Travail à ferrer au fond. Les lampes sur les chapeaux sont à flamme nue. (...)
  • 06 . Organisation de la garde des écuries aux mines de Cessous (Gard). © (...)