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Du portage aux grandes voies du fond. Les chevaux des mines (3).

D 1er décembre 2012     H 10:39     A Traitgenevois     C 0 messages


Si l’utilisation du charbon remonte à l’antiquité, il faudra attendre le 13ème siècle pour voir apparaitre le charbon dans les textes officiels en France.
L’exploitation du charbon à cette époque est extrêmement rudimentaire.
La seule technique employée est celle du grattage sur les gisements affleurants.
Les trous creusés pour atteindre ces couches de charbon n’excèdent pas quelques mètres. Il n’y a pas d’exploitation à proprement parler, juste une "récupération" qui est l’œuvre de quelques paysans.
 
C’est seulement à partir du 17ème et surtout du 18ème siècle que se développera une industrie minière digne de ce nom. (1)
 
Givors. 1780.
© Collection Yves Paquette.
 
Cependant la pratique des chevaux dans l’exploitation minière, ou ce qui en tient lieu, est attestée selon les sources à partir du 13ème ou du 16ème siècle. La traction animale est utilisée pour le transport vers les zones d’utilisation puis, les techniques se développant, pour la ventilation, le pompage et l’extraction.
Mais le cheval reste en surface et n’est pas utilisé au fond (2).
 
© Collection Yves Paquette.
Au 18ème siècle que pouvait-on observer dans la région de Rive-de-Gier ?
Les chevaux actionnaient les pompes chargées d’extraire l’eau le plus souvent présente dans les mines.
Jusqu’à de faible profondeur, de l’ordre de -30 mètres, un treuil manœuvré par des hommes pouvait être utilisé pour remonter le minerai. Au delà et jusqu’à -80 mètres, un cheval prenait la relève. Deux chevaux officiaient pour des profondeurs plus importantes .
Sur les routes, ce sont jusqu’à 1500 mulets qui seront chargés du transport du charbon vers Lyon, Givors, Vienne ou St Etienne (3).
 
Il faut aussi remarquer que dans de très nombreuses mines ce sont des enfants, des femmes ou des hommes, les sorteurs, qui ramènent le charbon à la surface. Cette remontée s’effectuait par des galeries à plan incliné ou à l’aide d’échelles. Cette manière de faire concernait des puits jusqu’à 100 m de profondeur, parfois plus.Le charbon est contenu dans une hotte portée sur les dos et que retient une courroie fixée autour du front (4), mais aussi, dans la région de St Etienne par exemple, à l’aide d’un sac terminé en forme de capuchon
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Mais alors que se passe t-il donc au fond avant l’introduction des chevaux ?
 
Le Creusot et les mines de Saône-et-Loire- Louis Simonin-1865. Issue du site www.lecreusot.com.
 
Sur le front de taille se trouvent les piqueurs. C’est le poste considéré comme le plus "noble" de la mine. C’est aussi le mieux payé des salaires ouvriers et un des plus éprouvants.
Derrière se trouvent ceux chargés d’évacuer le charbon. Les porteurs s’en acquitteront avec des moyens rudimentaires : un sac de toile qui est porté sur le dos. Le portage est un moyen peu efficace et très dur qui aura complètement disparu en France en 1850.
 
Le charbon sera aussi transporté par brouettes puis dans des bennes sous lesquelles sont fixés des patins métalliques et qui glissent plus ou moins bien sur un sol très inégal. Ces bennes seront déplacées par des traineurs.
Viendront ensuite des bennes qui rouleront sur les sols irréguliers des galeries puis sur des rails. D’abord en bois, comme en Allemagne, ces rails seront bientôt en métal. Des pousseurs seront employés à convoyer ces bennes.
 
 
Souvent les enfants seront astreints à ces travaux pénibles.
Dans ces conditions les rendements sont assez médiocres.
 
Tous ces moyens cohabiteront pendant un certain temps selon les endroits et les époques.
 
L’introduction des chevaux dans les galeries.
 
Louis Simonin La vie souterraine ou les mines et les mineurs", Librairie de L. Hachette et Cie, 1867 .© Collection Yves Paquette.
 

C’est d’abord en Grande Bretagne que des équidés seront utilisés au fond.

Les poneys y seront surtout employés à cause de leur petite taille.
Dès le début du 19ème siècle les chevaux font leur apparition au fond des mines anglaises. Les chevaux déplacent leur charge sur des chemins de fer qui, dans un premier temps, seront en fonte avec des ornières creuses avant d’évoluer vers des rails saillants. Au plus fort de l’exploitation, 70 000 poneys seront présents au fond des mines de Grande-Bretagne.
 
Ce n’est qu’en 1821 que les premiers chevaux feront leur apparition en France dans les galeries des mines de Rive-de-Gier. Le mouvement ira en s’amplifiant dans les années qui suivront.
Les chevaux ne seront pas les seuls équidés à être utilisés.
 
© Collection Yves Paquette.
A Epinac les mulets seront préférés aux chevaux. Zulma Blanchet, ingénieur en chef de la Société anonyme des houillères et du chemin de fer d’Epinac, explique : "Les mulets ont été préférés aux chevaux sur lesquels ils ont l’avantage, à force à peu près égale d’ailleurs, d’être moins délicats, d’exiger moins de soins, d’offrir une taille plus petite (elle n’est que de 1m25 à 1m40) et de passer par conséquent dans des galeries de moindre section, d’être d’un prix d’achat moins élevé et enfin de ne demander que des frais relativement minimes de nourriture et d’entretien" (5).
 
Les poneys et les ânes seront eux aussi mis à contribution.
Des essais seront tentés avec des bœufs. Ceux-ci se révèlent trop lents et incommodés par la chaleur. L’idée sera abandonnée.
 
Dans son ouvrage paru en 1855, Amédée Burat préconise une hauteur de 1m70 et une largeur de 1m60 pour les galeries où circuleront les chevaux .
Les 1m60 doivent suffire pour que le cheval puisse se retourner.
Par contre il estime que dans les grandes galeries de roulage ces dimensions devraient être de 1m70 de hauteur et de 2m de largeur minimum (6).
On comprend à la lecture de ces grandeurs que le travail ne devait pas y être aisé.
Les chevaux devront nécessairement être de petite taille et la voie sera unique.
 
Fosse Delloye. Le cheval Bambino, dernier cheval à sortir des mines du Nord/Pas-de-Calais en 1976. Centre Historique Minier/Lewarde.
 
A partir de là, la traction animale ira en se développant, atteignant son apogée vers 1930.Comme il est possible de la voir sur la photo ci-dessus, les galeries gagneront en dimensions, permettant l’installation de deux voies de circulation dans les sections les plus importantes : les grandes voies.
 
La grande galerie de La Houve. Photo du blog  Hommage aux mineurs.
 
Le grand roulage de La Houve, en Lorraine, verra de puissantes locomotrices électriques se déplacer sur des voies métriques. Il est possible de voir là le chemin parcouru depuis les galeries de 1m70.

Nous examinerons plus loin l’évolution des techniques et leur incidence sur le reste de l’exploitation.
 
A suivre.
 
 
 
 
(1) Charbonnages de France.
(2)Tiré du livre "Les chevaux de mine retrouvés" de Sylvain Post (avec la participation du docteur Pascale Kientz-Lahner et de Jacques Urek), disponible en libraire, sur commande aux Ed. De Borée Diffusion.
(3) Alphonse Meugy. Historique des mines de Rive-de-Gier. Carillan-Goeury et Veuve Dalmont. Paris 1848.
(4) La vie souterraine ou la mine et les mineurs. Louis Simonin Hachette 1867.
(5) L’exploitation de la houille à Epinac- Zulma Blanchet. Autun Imprimerie Michel Dejussieu 1867.
(6) Géologie appliquée. Traité du gisement et de l’exploitation des minéraux utiles. Amédée Burat-Langlois et Leclercq. Paris 1855.
 
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